table de travail

« ça va vite ! ça va vite ! ça va trop vite ! »

Tout le monde connaît cette réplique de Josiane Balasko dans les Bronzés font du ski.

C’est exactement ce qui se passe dans une classe de CP pour les 2/3 de la classe. « ça va vite !ça va vite ! ça va trop vite ! »

L’enfant, qui sort de maternelle, se heurte à un rythme qui n’est pas le sien. Il se trouve encombré d’un tas de matériels, d’une multitude de matières, il était acteur de ses apprentissages, il devient logiciel dans lequel on doit rentrer un maximum de données. Il doit passer des évaluations sur des notions qu’il n’a pas étudiées, doit enchaîner sans prendre le temps d’enregistrer. Il a tant à apprendre qu’il n’a pas le temps de souffler entre deux apprentissages. Alors il coince, bugge.

L’enseignant, lui, est soumis au stress des évaluations, du programme, des programmations, du cahier journal, de l’emploi du temps, des manuels, qui se contredisent eux-mêmes dans leur méthode pédagogique. Il a le choix entre relâcher, stresser, compresser le temps, abandonner, déprimer. Peu choisiront de relâcher. Parce qu’à chaque fois qu’ils pensent trouver leur rythme , qu’ils prennent un peu de distance avec le programme imposé, une évaluation nationale survient, une inspection, un collègue, ou un manuel.

Ah, le manuel de maths : une page par jour dans certains fichiers (mes préférés 🤢). Dans la même journée, l’enfant va découvrir une nouvelle notion, la manipuler pour en saisir le concept, et passer à la fiche conceptualisation sur fichier. C’est comme si on disait à un débutant en musique : »Aujourd’hui tu vas découvrir un nouveau morceau avec des nouvelles notes, tu vas t’entraîner sur ton instrument, tu vas le lire dans le manuel, et tu vas l’interpréter devant la classe, demain tu découvriras un autre morceau. »

Ah, le manuel de lecture : un nouveau son tous les deux jours, le découvrir, observer sa graphie, l’écrire, manipuler les syllabes, lire des mots, des phrases, un texte, faire huit exercices de déchiffrage et compréhension, et hop, dans deux jours un autre son.

Sans oublier l’étude de la langue, la poésie, l’écriture, la production d’écrit, les sciences, les arts, le sport, l’anglais, l’informatique …

« ça va vite ! ça va vite ! ça va trop vite ! »

Quand est-ce qu’on respire ?

Et l’enfant ? S’il n’y arrive pas ? Tant pis, pas grave, pas le temps pour les états d’âmes. Soit il s’habitue, soit il ira consulter un orthophoniste, un psychomotricien, un ergothérapeute, un pédopsychiatre. Dans le meilleur des cas, il sera juste « dys » ou « TDA », dans le pire il développera une phobie scolaire et multipliera les soins. Pourquoi tant d’enfants développent-ils des troubles des apprentissages aujourd’hui ? Parce ce que l’école va trop vite.

Je le sais pour être en première ligne. Je suis de ces adultes qui enseignent au CP et je vois le rythme insoutenable imposé à nos élèves. J’essaie tant bien que mal de lever le pieds, mais les manuels, les collègues, les évaluations reviennent sans cesse vous rappeler votre lenteur. Garder le cap. Relâcher sans rien lâcher. Aller à un autre rythme. La marche sera peut-être plus haute pour certains pour accéder au CE1, car ils n’auront pas acquis les notions de stress, de servitude, d’oubli de soi, de stricte obéissance, mais cette année mes élèves apprendront à lire, à écrire et compter dans le respect de leur individualité.

Nos enfants sont comme la planète. Respectons-les. Protégeons-les.

Un commentaire sur “« ça va vite ! ça va vite ! ça va trop vite ! »

  1. Courage Caroline, tu as toujours donne le meilleur de Toi et je suis sure que t’es élèves et leurs parents t’en seront éternellement reconnaissants . Merci de tes partages utiles et bien-veillants.
    Je t’embrasse

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